Gouvernorat de Martinique, Rivière-Salée. Août 1930…
À six mille kilomètres de la métropole qui prépare l'Exposition coloniale de 1931, la Martinique vit à l'heure des vacances d'été. Au milieu de la plantation, la rue Cases-Nègres : deux rangées de cases de bois désertées par les adultes partis travailler dans la canne à sucre sous le contrôle des économes et des commandeurs. Parmi les enfants qui passent leur été à s'amuser se trouve José, onze ans, orphelin élevé avec dureté et amour par M'an Tine, sa grand-mère. Protégé du vieux Médouze, qui lui conte les récits d'esclaves africains, José est un dépositaire des traditions orales. Bientôt, la vie séparera les enfants, au gré de leurs succès ou de leurs échecs scolaires : la "canne" pour les uns, le certificat d'études pour les autres, et pour les plus studieux, le lycée de Fort-de-France…
Premier long-métrage de la réalisatrice martiniquaise Euzhan Palcy, Rue Cases-Nègres est l'adaptation passionnée du grand roman créole de Joseph Zobel. Sous le regard d'un jeune garçon situé à un âge charnière, c'est une page de l'histoire coloniale qui se raconte : celle des coupeurs de canne, tout comme celle des békés qui les exploitent. Contre l'omission et l'injustice d'un système aliénant, les souvenirs de José, teintés de nostalgie, amorcent l'apprentissage d'une vie nouvelle s'appuyant sur la transmission des anciens. Soutenue à l'époque par François Truffaut, Euzhan Palcy filme ce récit de cœur avec une justesse naturelle, sans misérabilisme ni édulcoration et en laissant le champ à la réalité nue. Récompensé par de très nombreux prix à travers le monde, Rue Cases-Nègres, en plus d'être un symbole de l'identité collective antillaise, demeure un classique universel.